mercredi, janvier 24, 2007

Je suis né dans la communauté de l'acceptable

Je me souviens d'une fille, je lui dit je suis désolé le Mexique est trop loin. Elle me répond avec un air fin et intelligent que les distances ne sont pas importantes. J'acquiesce avec un sourire que j'estime ravageur. Je trouve sa réponse bête et stupide et matte ses gros seins qui pointent sous sa petite blouse de coton fleurie. L'air embaume de son shampoing parfumé à la noix de coco. La matinée touche à sa fin. La chaleur du soleil est encore supportable et agréable. Je dis que le Mexique c'est un peu la Hollande des américains... Elle me regarde de travers. Ben ouais les putes la drogue tout ça quoi. Elle s'esclaffe en posant sa main sur mes abdos fermes grâce à mes exercices physiques réguliers et mon alimentation équilibrée. Je la désire. Elle s' approche de moi, je suis un peu mal à l'aise. Ce n'est pas sa présence, ni sa chaleur. Ni son parfum patchouli écoeurant dont elle asperge son vieux gilet miteux et qui me donne limite la gerbe. Ce qui me gène c'est son amour trop sincère. Elle aime une image de moi, une représentation, un mirage acceptable pour l'alchimie bio-électrique de son cerveau. Je l'embrasse rapidement, je lui dis que j'ai des choses à faire et je m'en vais. Je ne crois pas lui avoir reparlé depuis. Je suis incapable d'aimer.

Autre jour, autre heure, autre moment (autre vie peut être) :
50 video-clips et cinq chansons en boucles comme explication du cosmos. Je crois que c'est à peu près tout ce que peut contenir son petit cerveau. Je lui demande si elle connaît le Lied. Elle me dit non, elle va faire ses courses chez Aldi Elle a quand même un atout : Son petit cul moulé dans un mini-short latex vert pomme. A la radio, ils passent Macumba de Jean-Pierre Mader. Elle me dit que c'est son chanteur préféré, qu'elle l'adore que ses chansons son trop belles.


L'ordinateur dit au fonctionnaire que je ne suis pas solvable et lui donne les mesures nécessaires qu'il devra prendre. Le fonctionnaire me dit que le système n'est pas contre moi. Il me dit aussi qu'il fait son travail.

Je suis né dans la communauté de l'acceptable et de la vente par correspondance où notre imaginaire est fait de millions de publicités (je me souviens d'avoir acheté un superbe pull motifs jacquard couleur chocolat, le plus beau pull que j'ai jamais acheté). Nous ne somme plus confronté à la réalité. A peine vivant nous somme les réceptacles des flux d'information de la réalité médiatique, guère plus utiles et fonctionnels que nos télés, chaînes hi fi, graveurs De DVD. Le jour où les machines n'auront plus besoin de nous pour appuyer sur le bouton Power, nous deviendrons obsolètes. Le quotidien ne nous interpelle plus désormais que dans son extrême violence. Tout a l'heure je me suis brûlé la peau au creux du bras (là où la chair est la plus tendre) avec un mégot de cigarette. Pas pour exprimer ma souffrance. Mais plutôt pour la ressentir. La douleur venant du frottement permanent du tissus de ma chemise avec la brûlure me raccroche à la réalité, empêche mon esprit de se disperser. cet après midi là, juste après avoir vu la chute d'un corps, celui d'un homme se jetant du vingtième étage, je pris conscience de la trajectoire courte et éphémère d'une vie humaine. Je crois que c'est en voyant ce corps écrasé et encore frémissant que mon cerveau a finit par disjoncter. Je ressentais une sorte d'euphorie métaphysique, le cosmos me renvoyait à la face la stupidité de mon existence par l'entremise du suicide de cet humain lambda. J'en éprouvais une sorte d'extase mystique jouissive et terrifiante à la fois. Comme un bébé qui chie pour la première fois sans ses couches.

Dans le restaurant un homme en complet-veston gris, lunettes épaisses d'écaille noire se leve et dit d'un ton pressé : vous approchez de la fin, finissez-en !

Ils m'ont enfermé dans une pièce de quinze mètres carré, dans une sorte de cube d'acier poli reflétant à peine mon image. Mais je ne sais pas qui « ils » sont, ce que je fais là ni pourquoi. Je suis enfermé ici depuis une éternité. Sur un des murs on devine le contour d'une porte, une rainure tellement fine que l'on ne pourrait pas y passer une lame de rasoir. Je me demande ce qu'il y a derrière, je ne l'ai jamais vue ouverte. J'ai l'impression de dériver dans le vide intersidéral, loin de toute humanité, J'ai essayé de taper sur les parois mais mes coups restent muets. Des petits spots fournissent une lumière tantôt puissante et éblouissante, tantôt tamisée. Les phases artificielles de jours et de nuits se suivent selon un rythme irrégulier, elles semblent parfois durer quelques minutes ou parfois des journées entières. Le temps n'existe plus je vis au présent dans une sorte d'angoisse permanente. Là, à l'instant, une lumière éblouissante me rend presque aveugle. Les contours des mots se dessinent à peine sur le papier. Je crois qu'ils cherchent à me rendre fou. Ou à révéler ma folie ? Une cuvette d'acier me sert pour faire mes besoins et une toilette sommaire. Je suis seul, nu, avec mon odeur corporelle. Depuis des heures, j'écris car c'est le dernier acte qui me persuade d'être vivant. De temps à autre une voix surgit de nulle part et me pose des questions. Quel est votre nom ? A quoi pensez vous quand vous êtes confronté à la mort ? Avez-vous tué votre père ? Arriviez vous à faire jouir la fille de la voisine dans sa petite chambre rose bonbon ? Que faites-vous pour compenser vos pulsions de mort ? Éprouviez-vous du plaisir à brûler des mouches plantées sur une aiguille à l'age de six ans ? Arrivez-vous à déféquer sous le regard désapprobateur de votre petite amie ? Vous souvenez -vous des moqueries de vos parents découvrant vos premières masturbations ? Ca vous faisait quoi d'être un gros lard puant la sueur à l'âge de quinze ans ? Pourquoi n'avez vous pas le courage de vous suicider ? Je suis probablement l'objet d'une expérience. J'essaye de me raccrocher à mes souvenirs mais je pense que ma santé mentale s'étiole. Bientôt il ne restera plus rien de moi. De temps à autre, je m'endors et, à mon réveil une assiette de nourriture se trouve devant la porte. Des feuilles de papier et un crayon se trouvent parfois à côté de la nourriture et la voix me dit : écrivez. Ce que je fais. Je n'ai jamais vu la porte ouverte. Peut être est-ce mieux ainsi.

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